Un nouveau rapport d’experts, préparé pour le compte du PNUE (Programme des Nations unies pour l’environnement), conseille de responsabiliser, avec des missions et des moyens nouveaux, non seulement les instances de l’ONU déjà saisies, mais le Conseil de Sécurité, dont le rôle devrait être modifié. Il fait également des propositions relatives aux nouveaux moyens d’intervention, financiers et réglementaires, à mobiliser sans attendre.
Le gouvernement fédéral d’Allemagne a créé le Wissenschaftlicher Beirat der Bundesregierung Globale Umweltveränderungen (WBGU) ou German Advisory Council on Global Change en 1992 à la suite du Sommet de la Terre de Rio. Il s’agit d’un organisme d’étude capable de mobiliser de nombreux experts internationaux à la compétence reconnue. Le WBGU travaille en étroite liaison avec l’ONU. Il produit des études et rapports soit sur demande du gouvernement fédéral ou de l’ONU, soit de son propre chef. Leur qualité est mondialement reconnue.
Son dernier rapport, réalisé pour le compte du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) , a été publié le jour de la remise à Oslo du prix Nobel de la paix à l’ex-président américain Al Gore et aux experts du GIEC. Il vient à point nommé pour alerter les représentants des gouvernements réunis à Bali du 10 au 14 décembre 2007 afin d’étudier les suites à donner au Protocole de Kyoto.
Un rapport catastrophiste de plus, diront les intérêts opposés à toute mesures sérieuses destinées à contrôler la hausse des températures globales. C’est en fait bien plus que cela. Au-delà de l’étude des évolutions géoclimatiques et biologiques en cours, le rapport développe les conséquences socio-politiques de leur aggravation. Il le fait en des termes dont le réalisme n’avait jamais été exprimé aussi brutalement. Le réchauffement climatique pourrait provoquer une “guerre civile mondiale”, voire des guerres tout court, dont le rapport détaille les différentes composantes.
En ce qui concerne les mesures de prévention à adopter sans attendre, le rapport va aussi très loin dans l’audace. Il conseille de responsabiliser, avec des missions et des moyens nouveaux, non seulement les instances de l’ONU déjà saisies, mais le Conseil de Sécurité, dont le rôle devrait être modifié. Il fait également des propositions relatives aux nouveaux moyens d’intervention, financiers et réglementaires, à mobiliser sans attendre. Signalons seulement que la question de l’énergie nucléaire n’a pas été vraiment abordée, ce qui dans une certaine mesure limite la portée des recommandations visant à limiter la consommation des énergies fossiles.
Les Européens remarqueront que le rapport, rédigé par des scientifiques allemands et suisses, incite le gouvernement allemand à prendre des positions exemplaires, au sein de l’Union Européenne puis ensuite de l’ONU. C’est la première fois qu’aussi explicitement, un organisme allemand revendique pour son gouvernement une responsabilité globale de cette ampleur. Le sérieux et le professionnalisme germanique ne doivent pas être pris à la légère. On retiendra le nom de Hans Schellnhuber, directeur de l’Institut de recherche sur l’impact du climat de Potsdam, qui a encadré les travaux.
Les déclarations ayant accompagné en France le Grenelle de l’Environnement, dont les suites peinent à voir le jour, semblent par comparaison assez pâles. Nous ne pouvons en ce qui nous concerne que nous réjouir de voir s’établir ainsi un climat de concurrence entre deux grands Etats au sein de l’Union européenne.
Les notes :
http://www.pan-europe.org/article.php?article_id=340
Morceaux choisis d’un autre article sur le même PNUE (Programme des Nations unies pour l’environnement):
Alors que les gouvernements se retrouvent à Bali, Indonésie, à partir du3 décembre 2007, pour débattre de l’avenir du Protocole de Kyoto, le Rapport mondial sur le développement humain du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) prévient que le monde devrait faire porter toute son attention sur l’incidence des changements climatiques sur le développement, lesquels risquent de causer des revers sans précédent en matière de pauvreté, de malnutrition, de risques sanitaires et de sous-éducation.
Le rapport, intitulé “La lutte contre les changements climatiques : la solidarité humaine dans un monde divisé”, brosse un tableau sans complaisance de la menace que représente le réchauffement planétaire. Il fait valoir que le monde se rapproche d’un « point de basculement » qui risque d’entraîner les pays les plus pauvres de la planète et leurs citoyens les plus pauvres dans une spirale infernale, laissant des centaines de millions de personnes confrontées à la malnutrition, au manque d’eau, aux menaces écologiques, et à la perte de leurs moyens de subsistance.
En dernière analyse, le changement climatique représente une menace pour l’humanité dans son ensemble. Mais ce sont les pauvres, qui ne sont pas responsables de la dette écologique accumulée par les pays riches, qui vont en supporter immédiatement le coût humain le plus lourd.
Les menaces
Le rapport précise avec de nombreuses données scientifiques la façon dont les populations pauvres subiront l’impact écologique du changement climatique. Pour les 2,6 milliards de personnes qui survivent avec moins de $2 par jour, la tendance pluri-décennale à l’amélioration (lente) des niveaux de vie risque de ralentir puis de s’inverser. Parmi les menaces identifiées dans La lutte contre le changement climatique figurent :
* L’effondrement des systèmes agricoles de plus en plus exposés à la sécheresse, à l’augmentation des températures, et à des précipitations plus imprévisibles, entraîneront 600 millions de personnes supplémentaires dans la malnutrition. Les zones semi-arides d’Afrique sub-saharienne parmi les plus pauvres du monde risquent d’enregistrer une diminution de 26 pour cent de leur productivité d’ici 2060.
* D’ici 2080, 1,8 milliards de personnes supplémentaires pourraient être victimes du stress hydrique, de vastes régions d’Asie du Sud et du nord de la Chine étant confrontées à une crise écologique grave liée au rétrécissement des glaciers et à la modification des précipitations.
* Le déplacement de 332 millions de personnes vivant dans les zones côtières et dans les zones de faible élévation du fait des inondations et des tempêtes tropicales. Plus de 70 millions de personnes vivant au Bangladesh, 22 millions au Vietnam, et six millions en Égypte, pourraient être touchées par des inondations dues au réchauffement de la planète.
* Les risques sanitaires nouveaux, avec 400 millions de personnes supplémentaires qui pourraient être exposées au paludisme.
Malheureusement, si l’on peut dire, les réformes proposées par le rapport, que nous venons de résumer, supposeraient deux choses considérées encore aujourd’hui comme impossibles:
– Un rejet radical du capitalisme libéral sous sa forme actuelle, qui laisse à des acteurs financiers anonymes la responsabilité de prendre les grandes décisions (par exemple poursuivre les recherches de réserves pétrolifères à des coûts et avec des risques environnementaux grandissants).
– Un rejet symétrique de l’unilatéralisme et de l’égoïsme des grandes puissances, qui mettent en priorité la sauvegarde de leurs intérêts économiques et politiques.
Il ne saurait être question d’exclure le calcul économique et la recherche de profit, mais ceci doit se faire dans des cadres compatibles avec les objectifs définis par le rapport: par exemple entre acteurs développant des solutions rentables en matière d’énergie de substitution.
Il ne saurait pas davantage être question de refuser aux gouvernements la responsabilité des politiques d’économie d’énergie et de développement durable intéressant leurs citoyens , dès lors qu’elles respecteraient les objectifs proposés par le rapport.
Cependant, pour concilier ces objectifs différents, une forme de gouvernement mondial encore inexistante devrait être mise en place. S’agit-il d’une utopie? Les experts et les diplomates travaillant dans le cadre de l’ONU répondront qu’il n’en est rien. L’ONU devrait pouvoir jouer un rôle majeur dans l’avenir face à ces enjeux de civilisation. Mais il faudra pour compléter et parfois déclencher ses interventions que des puissances régionales, par exemple l’Union Européenne en ce qui nous concerne, prennent aussi le relais afin de décentraliser les décisions et le contrôle de leur exécution.
On voit que face aux problèmes soulevés par le rapport, nous sommes non seulement à l’aube d’une nouvelle civilisation en matière de mode de vie, mais aussi d’une révolution en matière de gouvernement collectif. Se trouvera-t-il assez d’humains pour le comprendre?
Les notes :
Je me demande si c’est pas justement ce à quoi veut arriver Bush et ses amis. Une bonne grosse guerre des pays riches contre les pays pauvres, histoire d’engraisser un peu plus le complex militaro-industriel. Va faloir acheter des actions chez Dassault…
http://www.pan-europe.org/article.php?article_id=261